Wednesday, January 26, 2011

Et si … étrange histoire

Quand cela s’est passé, j’étais enceinte. Mon ventre n’était pas encore visible, bien que j’entamais déjà le quatrième mois de grossesse. Je n’étais pas tellement enthousiaste à l’idée de porter un bébé. Mon état a changé, trop changé depuis. Je suis toujours fatiguée, le moindre petit effort m’exténue, et j’ai une éternelle envie de pisser. Peut-être toutes les trente ou soixante minutes, je suis obligée de trouver un endroit pour décharger une petite quantité d’urine. Pas beaucoup, souvent juste une bouchée, mais la pression m’est toujours intolérable, et il m’est impossible de me retenir.

Quand cela s’est passé, je savais que j’avais fait une grossière erreur, et j’avais nettement l’impression que quelque chose de très grave, de vitale, allait m’arriver, mais je n’arrivais pas à cerner lequel, comment, où, quand… Je savais, oui, savoir, c’est le mot; je savais que je risquais très gros, que la tournure des évènements allait changer complètement et irréversiblement ma vie, mais ce que je ne savais pas, c’est si je pouvais l’éviter, ni quoi éviter ou comment l’éviter.

Quand cela s’est passé, je sortais du cabinet de gynécologie et je venais de boire une grande quantité d’eau, mais j’avais oublié d’aller aux toilettes avant de partir. J’ai ressenti l’envie de pisser au moment exact où je me suis rendue compte que j’aurais dû le faire avant de quitter le local du Cabinet Maeva, je faisais alors la queue pour attendre le bus qui me ramènerait chez moi. Instinctivement, j’abandonnais l’idée d’aller en bus pour rentrer, et je prenais le premier taxi qui passait à l’arrêt. Le taxi allait vraiment vite, et il n’y avait pas d’embouteillage, mais quelque chose d’étrange se passait.

Quand cela s’est passé, un gendarme a arrêté le taxi qui me ramenait, alors qu’il y avait un ou deux kilomètres à rouler avant d’arriver chez moi. Il nous a informés que la zone est sous investigation, et qu’aucun véhicule n’est autorisé à rouler un mètre de plus, et que le conducteur devait s’arranger avec les passagers et faire demi-tour. J’ai alors accepté de descendre et m’apprêtais à faire le reste à pied. Le gendarme n’a pas donné d’autres explications sur l’investigation qui a lieu, mais mon pressentiment m’indiquait que j’étais concernée, que cela avait quelque chose à voir avec la maison où j’habitais.

Quand cela s’est passé, un très grand nombre d’hommes en uniformes ornaient la ruelle que j’empruntais. Tous, ils me regardent étrangement, comme si je n’avais pas ma place dans ce scène, et certains me fixent du regard comme si j’étais coupable de quelque chose. Cela me donnait une étrange panique qui à son tour, aggravait mon envie de pisser. Un kilomètre à pied, ça n’use pas les souliers mais quand vous avez très très très envie de pisser, cela parait interminable. Je sentais que ma vitesse augmentait exponentiellement, tout comme la pression de mon bas-ventre. La ruelle qui mène chez moi, c’est une ruelle de campagne, peu de piétons normalement et bordée de quelques arbres et arbustes ici et là, où je faisais mes besoins parfois quand j’étais encore petite.

Mais quand cela s’est passé, je ne pouvais pas satisfaire mon besoin derrière le premier arbuste qui croisait mon chemin, à cause de ces hommes en uniforme qui m’auraient aperçue. La pression était pourtant à son comble, mais l’allée n’était pas dégagée. Devant moi, je n’apercevais plus d’autres personnes qui m’auraient gêné, mais derrière, je voyais quatre hommes qui marchaient à la même vitesse que moi. J’avais le choix entre me forcer à me retenir, avec le risque de faire dans ma culotte, ou bien satisfaire ce besoin pressant sous les regards de ces hommes étranges. Après une courte réflexion, je comprenais que la première n’est pas la solution car je ne pourrais tout simplement pas me retenir jusqu’à arriver chez moi, même en courant de toutes mes forces. C’est alors que je me suis arrêtée, faisant semblant de chercher quelque chose dans ma poche, et les hommes me dépassaient sans même me regarder. Une fois dans leurs dos, je me suis accourue vers le rebord de l’allée, me cachant derrière un arbuste, puis je me suis mise en position accroupie et déversait ce liquide qui me faisait une si grande peine. Se décharger de ce lourd fardeau, c’était une sensation au summum de l’agréable, que j’aurais très vite oublié… Mais pendant que ce déversement était fait seulement à moitié, j’ai entendu la sirène assourdissante d’une voiture de police ou de pompier, puis je voyais les quatre hommes revenir, m’aveuglant avec une torche électrique.

Pisse-Vache, une peinture de Paul Pinson montrant en vue de face un femme en bleu qui pisse

Cette illustration est une toile de Paul Pinson, publiée sur ce blog avec son aimable autorisation. En retour, avec mes remerciements, je vous propose de voir ses expo ou ses autres blogs

Quand cela s’est passé, je n’étais pas enceinte, et ces hommes en uniforme n’existaient pas. Cette allée que je croyais mener chez moi, je ne la connais même pas, je ne la reconnais pas dans mes moindres souvenirs. Non, je n’étais pas enceinte, j’étais même encore vierge. Je venais de me marier, et c’était ma nuit de noce. J’étais dans notre lit, je rêvais, à côté de mon tout nouveau mari. Je le connaissais depuis sept mois, on s’aime à la folie et on n’a pas encore fait l’amour. On a failli faire l’amour une fois, mais quand je lui ai prévenu que j’étais encore vierge, il a dit que c’était la plus merveilleuse nouvelle que je pouvais lui donner, et qu’il souhaitait attendre notre nuit de noce pour notre première fois. Ce jour-là, on s’est marié. Après la fête, j’étais un tout petit peu ivre, et lui trop fatigué d’avoir tellement dansé, qu’on a, d’un commun accord, préféré dormir pour se ressourcer; et on a mis l’alarme à vingt-trois heures, afin que notre première fois eusse lieu le même jour de notre mariage. C’était cela la réalité, les autres sont mes rêves. La sirène que j’ai cru entendre dans mon rêve, c’était l’alarme de son téléphone, la torche aveuglante, c’était l’ampoule qu’il a allumé. J’ai fait un rêve, un étrange rêve, rien n’était réel, sauf le litre d’urine que j’ai déversé dans notre lit, à travers ma robe de mariée. Oui, dormir avec ma robe de mariée ne me gênait pas, et il trouvait cela sexy, je me suis endormie avec ma robe de mariée.